samedi 18 janvier 2025

Evolution de l'aménagement des espaces agricoles de stockage

Réflexions sur l’évolution des bâtiments de stockage des aliments au cours des XIX, XX et XXI èmes siècles.

Jusqu’au  XX ème, les bâtiments agricoles étaient généralement alignés et attenaient à l’habitation.

1. Le fenil, lieu de stockage du foin en vrac et des denrées, est situé au-dessus des étables. Il est alimenté par une ouverture extérieure assez petite appelée « bawette » (lucarne en français). Le foin et les denrées récoltés sont amenés des champs par des chariots (chars à foin et à denrées). Le déchargement s’effectue péniblement par cette ouverture. Ensuite, le foin est disposé et entassé en ce lieu pour être distribué au bétail durant l’hiver. Exemple : Ferme Grommersch n°15

C’est par une trappe que le fermier transfère chaque jour le foin dans l’étable. 


Quand l’espace de stockage intérieur du fenil est insuffisant pour les denrées, le fermier construit une meule circulaire ou rectangulaire avec les gerbes de denrées. (épis vers le centre de la meule). La toiture de la meule, de forme conique, est couverte de genêts pour la protéger des pluies. Quelques rares meules sont encore construites juste après la guerre 40-45.

 

2. Certaines fermes ont été construites avec une grande ouverture murale, généralement réalisée en façade pour permettre l’entrée d’un char dans le bâtiment. Les étables sont alors situées de part et d’autre de cette ouverture. Ainsi, il devient possible de décharger dans de meilleures conditions dans les espaces de stockage se trouvant au-dessus des étables. Cette opération de déchargement exige également plusieurs personnes car l’espace de stockage est important en surface et en hauteur jusqu’en pointe de toiture. On procède alors par paliers pour monter les tas. Ce sont les enfants qui tassent le foin au-dessus des tas. Exemples : Ferme Melchior n°10 , ex ferme Wilmotte n°2 (°<1800), ferme des sœurs Bihain n°6 (°1810).

 

3. Pour limiter la pénibilité et augmenter l’espace attribué aux bovins, le char de foin ou de denrées est alors amené au-dessus des étables. La configuration du terrain peut permettre cette éventualité. Dans d’autres cas, il faut construire une rampe d’accès parfois en arc de cercle si nécessaire. Ainsi, le déchargement est facilité.

Avant l’arrivée des tracteurs, c’est le cheval qui doit tirer le char de foin dans la rampe, appelée « pont d’ul bâtir » (pont de la grange). Ce cheval doit se donner de la peine pour soulager son maître. Exemples : Ferme Mossoux n°19, ferme Jacqemin n°1 et ferme Didier n°x avec la particularité de l’entrée par le pignon.

Cette dernière avancée consistant à arriver avec le char au-dessus des étables est grandement appréciée par les fermiers. Ainsi, plusieurs fermes construites suivant la disposition &2, ont été modifiées après la guerre 40-45. Exemples : Fermes Bihain n°18, Remy n°12 et Wilmotte n°13.

 

4. Durant ces derniers siècles, il est à remarquer que le stockage des grains n’a pas été marqué par d’importantes modifications dans la structure des fermes.

Après battage, que ce soit au fléau ou plus tard avec une batteuse, les grains sont versés dans de grands sacs de jute puis montés au grenier à dos d’homme par les escaliers de l’habitation. Ce travail pénible offre jusqu’en milieu du XX ème siècle, la meilleure  protection contre le vol et la destruction par les rongeurs. C'est aussi un endroit idéal pour garder les grains au sec.

La peur du vol d’un bien précieux (graines pour nourrir le bétail et ensemencer les récoltes) est maintenue dans l’ADN de plusieurs générations. Au XVIII ème siècle et parfois encore au XIX ème sur d’anciennes habitations, toutes les fenêtres du rez de chaussée sont munies de solides barreaux disposés verticalement (ex. ferme Wilmotte n°2).

Quelques rares améliorations ont été réalisées ; certaines fermes se sont équipées d’un treuil disposé dans un débordement de toiture pour pouvoir accéder au grenier à partir de l’extérieur du bâtiment (ferme Remy n°12). Pour d’autres fermes, profitant de l’évolution (voir &3), le mur du grenier a été percé et un escalier permet d’accéder directement au grenier à partir de la grange

 



5. L’élevage de moutons roux d’Ardenne  a complètement disparu du village au cours de XIX ème siècle. C'est une race résistante à faible apport de viande, les plantations d'épicéas ont contribué à sa disparition. Quelques habitations anciennes maintenant démolies, ont gardé les marques de cette époque. L’entrée de la bergerie (ouverture  en arcade d’environ 2,5 mètres de large et de 2,5 mètres de hauteur) était généralement disposée en partie extérieure de la façade du bâtiment. Exemples : Ex ferme Wilmotte n°2, ex ferme Lafalize n°X (°1836) et ferme Mossoux n°19 (suite à des travaux d’aménagement, l’ouverture de cette dernière n’est plus visible)

 

6. Fin du XX ème et au XXI ème siècles, il n’est plus question de construire ainsi. Les étables sont indépendantes de la zone d’habitation. Les tracteurs et engins agricoles sont omniprésents et disposent de fourches et de pinces pour manutentionner de gros ballots de foin et de paille pressés et emballés sous plastique pour être étanches. Les ballots sont bien souvent entassés à l’air libre sur une zone bétonnée.

Les grains ne sont plus stockés en sacs dans les fermes, mais directement vendus lors de la moisson ou parfois stockés en vrac et vendus suivant les prix du marché. Le bétail est alimenté par du maïs et d’autres aliments achetés. Quant aux semences, elles ont été sélectionnées et transformées par de grands groupes commerciaux pour mieux résister aux intempéries et produire plus. Ainsi, la production a pu doubler en 50 ans. Le fermier est maintenant totalement lié à ces fournisseurs car il n’est plus possible d’ensemencer avec la production de l’année précédente.


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