samedi 27 janvier 2018

Dérives des Intouchables


En milieu de XXe siècle, l’éducation des villageois est encore modelée par 2 personnes, le curé et l’instituteur. Par leurs discours ils imposent les règles de conduite, dont celles de leur domination. L’instituteur se fait appeler « Monsieur le maître ». Quant aux instructions du clergé elles sont mûrement réfléchies. Les croyances sont adaptées en fonction des époques pour mener le peuple et connaître ses brebis.
Le curé est le gestionnaire local  de ces croyances, il dicte et impose les règles. Malheur à celui qui ne fréquente pas la messe du dimanche ou travaille le jour du seigneur sans autorisation cléricale. Il est montré comme le mauvais exemple lors du sermon et l’exclusion mène en enfer. Malheur aussi à l’enfant décédé avant le baptême, son âme va dans les limbes et son corps physique n’a droit qu’à un minable coin de cimetière.

Et pourtant, cette religion catholique nous est bien utile. Pour la simple et bonne raison qu’au début des temps, la société n’avait pas de balises ni de repères.
En créant une religion, on a mis en place des structures pour sauver la morale et conduire l’être humain vers son élévation. La religion est un guide qui évite les écarts quand dans nos régions, l’état n’a pas encore mis en place tous les moyens juridiques et policiers. Les villageois ainsi éduqués craignent l’enfer et se confessent régulièrement par obligation. Ce qui permet aux prêtres de tout savoir et d’être juge. Ils condamnent, infligent des pénitences et peuvent accorder la rémission de toute faute en  gardant le secret vis-à-vis de la loi du pays.

Ces responsables ne sont hélas pas toujours à la hauteur de leurs devoirs d’éducateur. Par leur influence ils peuvent conseiller, par exemple « l’acceptation » dans le cas de l’assassinat de Marie-Louise Zune en période de guerre, le 22/11/1944. Voir rubrique « Croix de Brisy ».
J’ai moi-même vécu des dérives importantes, presque inimaginables de l’instituteur, voir l’anecdote 5 de la rubrique « Ecoliers de Brisy ».  

Le but de ce texte, n’est pas de révéler toutes les anciennes dérives, mais de connaître le passé pour nous rendre plus attentifs aux actes des personnes responsables à qui nous confions l’éducation des enfants.

Plusieurs témoignages m’ont été communiqués concernant le curé de la paroisse de Sommerain officiant de 1966 à 2004 à Sommerain, Taverneux, Fontenaille et Brisy. En voici l’un d’eux : 

Le texte ci-dessous en caractères italiques a été rédigé en janvier 2018 par Guy DEUMER  (05-05-1964), celui-ci répondant de l’entière responsabilité du contenu. Si ce texte doit être reproduit pour quelque raison que ce soit, il doit l’être dans son intégralité (pas de citation partielle d’extraits sorti du contexte)

Le curé pédophile avait besoin d’un enfant de 7 ans pour se masturber !...

Vers l’âge de 6 ou 7 ans, les enfants suivaient une préparation en vue de faire   leur « petite communion ».  D’autre part,  les petits garçons étaient appelés approximativement au même moment  pour  « servir la messe », (devenir donc  « enfants de cœur »).  A nouveau une autre  petite formation était nécessaire à cette fin.
Ces deux préparations étaient dispensées par  le curé AC dans l’église du village. Des allées et venues vers la sacristie étaient courantes. Il habitait avec sa maman le presbytère qui se trouvait à une centaine de mètres de l’église. Pour différentes raisons, il nous demandait parfois de l’accompagner chez lui après l’office. A l’Eglise  comme à la sacristie, il était courant de se retrouver seul avec lui. A son domicile, sa maman était en général présente. Nous étions toujours bien accueillis. En notre présence, la maman s’efforçait d’appeler son fils : « Monsieur le Curé ».
AC était presque toujours vêtu d’une soutane noire. Lorsque j’étais petit, il avait une manière particulière de m’accueillir : il prenait ma petite tête dans les mains et la serrait un moment fort contre son ventre. A cette occasion, je sentais ses grosses mains trembler.  Je trouvais ce geste « peu conventionnel ». Cependant, il se répétait et  je m’y étais habitué en comprenant  que c’était sans doute sa manière à lui de nous faire un signe d’affection. Je me souviens en particulier de cette habitude lorsque j’arrivais à la sacristie pour enfiler la tenue juste avant l’office.   

Lors d’une  visite au presbytère, je me suis un jour retrouvé seul  avec lui et sa maman. Le but  « officiel » de cette visite et la date précise où elle eu lieu ne me sont pas restés en mémoire.  La pièce de droite en entrant  leur servait de cuisine mais c’était aussi la pièce où nous étions généralement reçus. La pièce de gauche était un deuxième endroit que je connaissais : petit salon où se trouvait accroché au mur face à l’entrée une grande peinture d’art représentant la maman du curé. Il m’avait dit précédemment que c’était aussi la pièce dans laquelle il lisait régulièrement la Bible. Les pièces à l’arrière du presbytère m’étaient inconnues.   
Le curé assez nerveux, avait fait plusieurs allées et venues entre la cuisine et l’arrière du presbytère. Je me trouvais dans la cuisine et la maman n’était jamais bien loin de moi. Il revient une nouvelle fois et dit à sa maman qu’il devait me voir seul et qu’il ne fallait pas nous déranger. Il me fait alors passer dans le salon et referme la porte derrière lui.  Nous étions tous deux dans le coin droit de la pièce où se trouvait le portrait de sa maman. Là il me prend la tête dans les mains, la frotte sur sa soutane dans le bas du ventre tout en me disant qu’il aimait beaucoup les petits enfants comme moi.  Cette fois, ce « massage » était assez intensif et  s’est poursuivi durant plusieurs minutes  (4 ou 5 minutes de mémoire). Je devais avoir approximativement sept ans. Il me repoussait en permanence la tête vers le bas de son abdomen, l’utilisant comme un objet  de massage. Ses grosses mains tremblaient. Tantôt la face de ma tête contre sa soutane, tantôt le côté avec l’oreille qui se repliait au passage, mes souvenirs sont assez précis à ce niveau. Durant cette action, j’ai par exemple clairement perçu sous sa soutane et en plus des vêtements qu’il portait habituellement, une épaisseur impressionnante de textiles disposés de façon irrégulière (une serviette de bain repliée ou équivalent). De l’autre côté de la porte sa maman a appelé plusieurs fois : « Albert, Albert … » et il lui répondait en substance « oui maman nous avons bientôt terminé …». Cela se passait tout début des années 70  dans le village de Sommerain (HOUFFALIZE).

A l’âge de sept ans, personne ne nous avait jamais parlé de « comportements  sexuels déviants ». Je ne pouvais évidement pas comprendre  le geste du curé. Cependant il est devenu clair dans mon esprit que ce ne pouvait plus rien être d’affectueux ; ce n’était même pas comique ni amusant. Je me suis donc d’instinct éloigné de cet individu, tant physiquement qu’en mettant systématiquement en doute dans ma compréhension le contenu de ses propos.  Pour ma part, je ne dois me semble-t-il la banalité des conséquences de cet incident qu’à la seule présence de la vieille maman avisée.
  
Le système éducatif d’un petit village disposant de sa propre école primaire à l’époque était « un vase clos ». En effet, l’instituteur tout comme le curé n’étaient dans les faits soumis à aucune autorité hiérarchique efficace. Les parents nous envoyaient à l’école et à l’église en nous recommandant « d’écouter  et d’être gentils ». L’instituteur enseignait qu’il fallait respecter ses parents, ses supérieurs  et  Monsieur le Curé, ce dernier renvoyant  enfin la balle à son tour. Dans mon enfance par exemple je n’ai jamais entendu personne nous enseigner que le bûcheron habitant le bas du village était tout autant respectable que le curé (or en l’occurrence, c’était pourtant bien le cas).  Finalement, dans la tête d’un jeune enfant de l’époque, la religion catholique et en particulier le principe même de la confession que l’on venait tout juste de nous inculquer consacraient clairement le curé comme étant l’autorité fixant en dernier ressort les limites entre le bien et le mal. Je n’ai pour ma part pas relaté l’épisode de masturbation du curé AC à mon entourage ;  peut-être est-ce pour toutes ces raisons ?....

De mon point de vue, il était également un prêtre pédophile plutôt «habile». Il savait très bien comment préparer son geste pour que l’enfant ne se méfie pas. Il savait quoi faire, quoi dire avec quel enfant et à quel âge agir. Son mode opératoire était au point ; jusqu’où « ne pas aller trop loin » afin que l’enfant n’en parle pas par la suite..…  Je pense bien que ses fantasmes de pédophilie se portaient en particulier vers les jeunes garçons  «à l’exclusion des petites filles », mais je n’en suis pas certain.

Aussi bien au cours de ses prêches que dans des conversations de la vie courante, le curé AC démontrait clairement qu’il n’avait pas toutes les idées bien en place dans sa tête lorsqu’il s’agissait de questions d’ordre sexuel.  Il n’était nullement nécessaire d’être psychologue pour s’en apercevoir. En tant que jeunes adolescents, nous avions d’ailleurs tendance à nous en moquer ouvertement. Le plus regrettable reste cependant que les adultes de l’époque n’étaient pas capables d’en parler, ni d’en témoigner, ni d’en tirer les conclusions  adéquates et nécessaires. Il en allait pourtant de la protection et de la sécurité des enfants. Si n’importe quel autre adulte du village avait tenu les propos d’AC, nos parents nous auraient invités à ne pas le fréquenter. Dans cette micro société de l’époque, le simple fait d’être instituteur ou curé de village permettait de facto de ne pas être soupçonné de mal  là où n’importe qui d’autre l’eut été en circonstances similaires.


Anecdote 25 : Acte de baptême hors mariage.

Il y a de cela plus de 300 ans, les attestations d’actes de baptême pour une naissance hors mariage étaient rédigées d’une façon particulièrement évoquante. Sans aucun respect pour les parents, bien moins encore pour la maman traitée de complice sous un régime religieux patriarcal. A cette époque et bien après sur tout acte de baptême, l’épouse n’était pas nommée, le prêtre indiquait simplement son prénom suivi de « la femme de Brisy ».

En voici un exemple rédigé par le prêtre officiant à Brisy en date du 28 décembre 1703.

« Fut baptisée Marguerite, conçue par fornication simple de Noël Grandjean de Brisy et Bastine sa complice».

Acte de baptême de Marguerite le 28/12/1703


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